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Enlèvement d’Hélène, par Marten van Heemskerck (notre arc-en-ciel quotidien)

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Maarten van Heemskerck (1498-1574) Panoramic Landscape with the Abduction of Hélène (1535) The Walters Art Gallery, Baltimore

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Marten van Heemskerck
(1498-1574) , Enlèvement d’Hélène, 1535-1536,
Baltimore, Walters Art Gallery

    Formé chez Cornelis Willemsz à Haarlem, puis chez Jan Lucasz à Delft, Maarten van Heemskerck travailla de 1527 à 1529 dans l’atelier de Jan Van Scorel à Haarlem dont le style l’influence : volumes affirmés, contrastes lumineux appuyés, plis tourmentés, goût des accessoires antiques, penchant pour les détails. Puis, l’un des premiers peintres du Nord à gagner l’Italie, il séjourne à Rome de 1532 à 1536, y dresse un interessant catalogue des antiques et de la basilique Saint Pierre en construction, dessine d’après Michel Ange; le « Paysage avec l’enlévement d’Héléne » est l’une des rares peintures conservées de sa période italienne: ce n’est pas à proprement parler un paysage, mais une « fantaisie panoramique » d’une étrange cité, amalgame de la Rome contemporaine doublement ruinée quelques années après le sac de Rome (1527) par les mercenaires, lansquenets allemands et les espagnols,  avec ses collines et son forum parsemés de ruines et d’une ville révée contenant quelques unes des sept merveilles du monde. Le colosse de Rhodes, le Château saint Ange, la tour de Babel  sont repérables au milieu de l’accumulation d’édifices aux architectures tantôt classiques et ruinées, tantôt . D’imposants acqueducs dessinent des entrelas au milieu des collines. Un Palais au sommet d’un jardin dessiné et bordé de statue pourrait évoquer les jardins suspendus de Babylone.  De même sur la mer les navires qui représentent les vaisseaux des Troyens et des Grecs, sont tantôt des galères, des trirèmes, tantôt des caravelles, faisant voisiner l’antique et le moderne. Le Phare d’Alexandrie manque, en ce bord de mer, de même que la statue de Zeus à Olympie, en ce prélude à la guerre de Troie.

    Les personnages sont perdus dans l’immensité de la composition (147,3 x 383,5 cm). Un grand arc-en-ciel dessinant un demi-cercle complet, enjambe les montagnes et la mer. Dépourvu du moindre réalisme météorologique, ses couleurs sont celles de l’arc de Pinturrichio dont la fresque se trouve à la librairie Piccolomini à Sienne; le sommet de l’arc disparaît dans les nuages.

    Revenu  à Haarlem, il peindra une vue d’ « arènes antiques » (1552, Lille), sorte de rêverie archéologique sur ses souvenirs romains; Heemskercke fut l’un des premiers avec Frans Floris à introduire l’italianisme dans les pays-bas du nord; il inspira beaucoup les graveurs de son temps: Philip Galle, Herman Muller, pour lesquels, dès lors que l’iconoclasme vivace aux alentours de 1567 fit s’effondrer les commandes de l’Eglise, il multiplia les dessins préparatoires à des gravures, souvent accompagnés de textes de l’humaniste Hadrianus Junius.