Neuroland-Art

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Irène (La Rubrique néo-natalogique de Klou de Montsercueil)

La Rubrique néo-natalogique de Klou de Montsercueil

Bienvenue à Irène ( avec un retard certain )


Neuroland, après l'arrivée en fanfare, instaure l'accueil en peinture


   Avertissement : d'après Sacher Masoch qui fit autorité, le thème d'Irène est très limite, et cet aspect n'a pas échappé aux peintres que nous avons mis à contribution ; par égard pour les parents, qui auront tout le temps de prendre conscience de la perversité polymorphe de leur chérubin, nous utiliserons les ruses que met à notre disposition la langue française pour ne pas appeler un chat un chat.

    Abordons ce délicat sujet par l'oeuvre d'un peintre dont le nom déjà contient la promesse de développements à l'infini et se retient à l'aide de la plus élémentaire mnémotechnie :

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Trophime Bigot ( Arles, 1579 - Avignon, 1650) Sainte Irène soignant Saint Sebastien
Musée des Beaux-Arts de Bordeaux

    C'est au musée de Bordeaux que l'on commence à comprendre pourquoi Saint Sébastien jouit à tort d'une réputation de martyr ( déjà se raidissent dans leurs bottes les orteils des inconditionnels de la Légende Dorée mais j'entends démontrer au delà de la provocation facile ) : comment ? avec toutes les flèches reçues entre le quatorzième et le dix-septième siècles,  Saint Sébastien ne serait pas mort ?

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A tribute to Albert Dupontel : Gerrit van Honthorst : saint Sebastian1623 + Jean Paul Sartre

    Avec les questions subsidiaires : un martyr qui ne trépasse pas des suites directes de ses blessures est-il toujours un martyr ? Sauver un prétendant au martyre qui agonise, comme l'a fait Irène, procède de l'assistance à personne en danger, mais en même temps ne serait-ce pas de l'inassistance à martyr en progrès ? De vraies questions de société, et plus encore une application inattendue du couple conceptuel comme si/comme non ( à ne pas confondre avec le c'est comme moi de Bernard-Henri Sulitzer ) ainsi que nous l'explique si bien Alex Hégète l'expert en agrumologie du site :

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    Rappelons ici que ce même expert, sollicité le temps d'une soirée pour le choix du prénom qui se portera in fine sur Irène, expliqua s'agissant d'un prénom féminin qu'il ne se reconnaissait aucune compétence, n'ayant eu que trois enfants. Il voulait dire : des garçons !

    À propos de lapsus fâcheux, revenons au pronostic vital de Saint Sébastien. Par exemple, ce tableau exposé à la National Gallery d'Ottawa découvert pas plus tard qu'hier nous persuaderait que le saint à peu de chance de s'en sortir, si l'on prend comme références les annales médico-chirurgicales* :

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Lorenzo Lotto La vierge et l'enfant Jésus entourés par Saint Roch et Saint Sebastien

    On remarquera au passage que Saint Roch patron des urgentistes niçois et Saint Sébastien se livrent à une partie de concours du plus malheureux : aïe ma cuisse fait le premier, ouïe** mon omoplate*** fait le second, preuve que ce sport n'a pas été inventé par les spectateurs de catastrophes ni par les escouades de secours psychologique inventées pour les soutenir dans ce drame qu'est ne pas être victime au premier degré mais seulement témoin.

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Trophime Bigot ( Arles, 1579 - Avignon, 1650) Sainte Irène soignant Saint Sebastien Photo BK

    Revenons à Irène : quelle expression peut-on lire sur le visage de Sébastien au fil de ses représentations classiques ? Non pas la souffrance, ni le désespoir, ni l'humiliation du vaincu, ni la haine du Grand Persécuteur qui l'a condamné, mais, comme l'a si bien rendu Trophime Bigot, l'attente du moment délicieux où Irène lui arracherait délicatement les traits décochés par les archers mauritaniens de Dioclétien.

   Georges de la Tour fait preuve d'un peu de retenue : on est au Louvre ! Il y a des enfants dans l'assistance en particulier le Mercredi, d'ailleurs nous n'y allons jamais ce jour-là.

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Georges de la Tour (Vic-sur-Seille, 1593 - Lunéville, 1652) Saint Sébastien soigné par Irène c.1649

   
    Vincente Lopez y Portana (1772-1850) lui se lâche complètement : il est exposé au Getty ... Los Angeles, la Californie, le laisser aller moral et la culture physique ...

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Vicente Lopez y Portana Sebastian e Irene

    Irène fait du bon travail et Sébastien est aux anges : à la présence près de la vieille femme qui parfois tient la lumière et dénoue les liens du supplicié mais dérange un peu l'intimité de ce couple mystique :

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Ter Brugghen Saint Sébastien soigné par Sainte Irène

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Nicolas Regnier Saint Sébastien soigné par Irène

    On peut même se poser des questions, si l'on fréquente Saint Etienne de Tinée et sa chapelle  : Sébastien n'en aurait-il pas redemandé ? Juste pour faire durer le plaisir à venir.


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Saint Etienne de Tinée Chapelle Saint Sébastien

Lequel peintre anonyme de l'arrière-pays niçois a dû lui fréquenter Florence :

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    Ce n'était qu'un mauvais moment à passer. Après, vint le temps des pansements et des massages personnels. Une main posée sur le genou, par exemple. Il fait chaud près de la lampe, pense celle qui va tenir la chandelle.

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St. Irene Removing Arrows from St. Sebastian's Leg 1638-1639,
Kimbell Art Museum, Fort Worth, Texas, USA


    Passons aux choses sérieuses : l'avenir de la progéniture. Si l'on prend soin de lui faire chaque soir la lecture de l'oeuvre de Jacques de Voragine, la petite Irène deviendra à coup sûr, chirurgienne de guerre ou infirmière en Mauritanie, et finira par épouser le petit-fils de Bernard Kouchner, à la condition qu'il se prénomme ...

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Gad el Maleh

* : loin de nous l'idée de relayer ici la promotion de Sébastien comme icone gay
 aïe, ouïe** : l'onomatopée est à la langue parlée ce que l'hiéroglyphe est à la langue écrite ( citation approximative de Charles Nodier )

omoplate*** : choix paradigmatique évitant une rime riche mais de mauvais goût ; mais renvoyant avec l'implaccable inéluctabilité du retour du refoulé à une charade à tiroir hugolienne de plus mauvais goût encore.