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Variations sur l'Alzheimer

Maladie d'Alzheimer II


Variations sur les formes cliniques de la maladie d'Alzheimer

       Nous vivons depuis plus de trente ans dans le dogme. Celui d'une Maladie d'Alzheimer une sur le plan histologique, derrière la variabilité des formes cliniques - des phénotypes cliniques pour parler le discours neurologiquement correct. Dogme énoncé outre-Atlantique, impliquant l'abandon de la conception originelle de la maladie définie par Aloys Alzheimer, baptisée par Kraepelin, et enseignée dans toutes les facultés du monde jusqu'en 1980 environ comme une démence dégénérative présénile, à côté de la maladie de Pick. Actuellement la méthode anatomo-clinique qui fondait les entités anatomo-cliniques est dépassée dans le domaine des maladies neurodégénératives. Lui est substituée une stratification nosologique à quatre niveaux, phénotype clinique auquel nous avons accès, nous cliniciens, phénotype anatomo-pathologique du domaine de la neuropathologie, phénotype protéique ou protéotype des biologistes moléculaires, enfin génotype du domaine des généticiens. Le phénotype protéique de la maladie d'Alzheimer est plus complexe, que celui de nombre de maladies dégénératives : on y trouve de la protéine tau hyperphosphorylée, de la protéine alpha-4 amyloïde, voire même dans nombre de cas de l'alpha-synucléine ( dans les corps de Lewy, et les neurites de Lewy ).

    Or il résulte d'une collusion entre l'anatomo-pathologie et la biologie moléculaire, une théorie du développement de la maladie d'Alzheimer, qui se ferait depuis les aires
corticales basales trans-entorhinales, jusqu'aux aires néocorticales primaires iso-corticales, en passant par une extension supéro-latérale limbique, contemporaine de l'apparition des premières manifestations cliniques. Nous ne laissons pas de nous interroger sur les méthodes qui ont permis de telles affirmations. Quelle est la protéinopathie première,  le dépôt de Tau ou de béta-amyloïde ? Ainsi s'opposent les tauistes et les Baptistes ( Bap = Beta Amyloïd Protein ). Pour Braak et Braak, le dépot est amyloïde.

stades de Braak

A : dépôts d’Alpha 4 amyloïde dans les aires corticales basales trans-entorhinales, stades I-II : cliniquement silencieux

B : extension supéro-latérale limbique,  stades III-IV : maladie d’Alzheimer incipiens

C : aires néocorticales primaires iso-corticales, stades V-VI : maladie d’Alzheimer avancée


demencebraakalz.jpg

    Pour Delacourte, la maladie d'Alzheimer est d'abord une tauopathie. Mais au fond baptistes et tauistes tombent d'accord sur la dynamique topographique du processus.

taudelacourtestades.jpg

Delacourte : Les 10 stades de la pathologie tau

Phénotypes cliniques

    Qu'il y eut des formes particulières de la maladie d'Alzheimer, certains s'en aperçurent très tôt, bien avant le pan-alzheimerisme. Nous voudrions ici passer en revue toutes les variétés cliniques susceptibles de remettre en question le dogme désigné communément comme le "Braakisme". Entreprise peut-être vouée à l'échec mais qui, comme nous le répétons dans chacune de nos analyses critiques, vaut le détours. Nous étudierons successivement :

Syndrôme de Benson

Aphasie progressive primaire

Formes fronto-temporales de la maladie d'Alzheimer

Démence sénile

Démence presbyophrénique de Wernicke

Aphasie amnésique de Pitres

Démences mixtes

Syndrôme de Benson

Syndrôme de Benson

video 1,2

Aphasie progressive primaire

Passons maintenant aux variétés phénotypiques cliniques de dégénérescence lobaire fronto-temporale avec trouble du langage prédominant :

aphasiesprogressivesprimaires.jpg

    Le terme d'Aphasie Progressive Primaire désigne selon Mesulam "une altération progressive du langage ( dissolution est le terme employé par l'auteur ) sans atteinte d'autres domaines cognitifs pendant au moins les deux premières années de la maladie".

     Stricto sensu, il nous semble comme aux neurologues de Manchester que non seulement l'aphasie non fluente progressive, dite syndrôme de Mesulam, mais aussi la démence sémantique répondent à cette définition.

Image_31.jpg

    Quelques remarques : la très grande dispersion des âges de survenue, et surtout de la durée de la symptomatologie aphasique isolée : cinq ans en moyenne, mais en fait de 18 mois à 20 ans !

Image_32.jpg

video 1,2

applogop.jpg

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    Une aphasie non fluente progressive primaire de Mesulam évoluera, la plupart du temps vers une démence fronto-temporale, vers une paralysie supranucléaire progressive, vers une dégénérescence cortico-basale, et dans un tiers des cas, vers une maladie d'Alzheimer. Sachant celà, et considérant combien est arbitraire la notion de deux années d'évolution sans autre atteinte cognitive, je pense qu'il faut s'acharner à déceler la moindre atypie. Ainsi chez cette patiente d'un très bon niveau socio-culturel qui présente une aphasie progressive non fluente agrammatique et qui me dit éprouver quelques troubles de la mémoire alors que ses difficultés de langage évoluent depuis environ deux ans maintenant :

video 3

    Le test de l'horloge, qui commence plutôt bien, malheureusement s'altère dans le sens d'une pathologie dégénérative plus complexe qu'une aphasie progressive primaire non fluente pure, si tant est que celà existe.

parfois la recherche aboutit à un résultat surprenant :

video 4

    Chez ce patient, la majoration selon son épouse de la symptomatologie m'a conduit à vérifier sans argument clinique majeur le scanner cérébral qui révèle un hématome sous dural hémisphérique droit très important imposant un drainage dans la journée. On a la notion d'un accident survenu deux mois plus tôt mais le patient n'a signalé aucun trauma crânien alors qu'il s'est plaint de contusions thoraciques et cervicales.

Gorno-Tempini ML, Dronkers NF, Rankin KP, Ogar JM, Phengrasamy L, Rosen HJ, Johnson JK, Weiner MW, Miller BL. "Cognition and anatomy in three variants of primary progressive aphasia." Ann Neurol. (2004) 55(3):335-46.



Formes fronto-temporales de la maladie d'Alzheimer

Démence sénile

Démence presbyophrénique de Wernicke

Aphasie amnésique de Pitres

Démences mixtes








tauisteamyloidiste.jpg

Phénotype anatomopathologique :

plaques séniles,
dégénérescence neuro-fibrillaire

Phénotype protéique : dépots de protéines anormales :

à l’extérieur des cellules :  protéines alpha-4 amyloïdes
à l’intérieur des cellules : protéine Tau hyperphosphorylée


amyloidenature.jpg
( schéma pubié par la revue Nature )

    Un rappel de la séquence aboutissant à la production d'agrégats de fragments de l'APP ( la protéine précurseur de l'amyloïde) A-béta42, découpé par l'action successive de deux enzymes protéolytiques la béta puis la gamma secrétase ; la régulation de cette voie potentiellement délétère ( par opposition à la voie de l'alpha-secrétase qui scinde l'APP sans former de fragment
A-béta42 ) dépend entre autres facteurs de l'action des présélinines codées par des gènes dont les mutations accroissent l'activité de la gamma-secrétase et donc favorisent la production de fragments A-béta42 qui se polymérisent et forment les plaques séniles amyloïdes.



Date de création : 05/06/2008 : 02:06
Dernière modification : 18/02/2010 : 13:25
Catégorie : Conférences
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